Voilà une semaine que le Symposium anime le Parc écologique du Millénaire dont la richesse naturelle est complémentée et même parfois rehaussée par les créations artificielles d’une douzaine d’artistes.
Il s’agit d’un bon temps pour prendre un peu de recul pour observer les résultats hétéroclites de toutes ces différentes démarches artistiques. J’ai donc décidé d’enlever mon chapeau d’essayiste-blogueur-scribouilleux et de me promener dans le Parc en tant que simple spectateur. Cependant, comme mes instincts d’essayiste-blogueur-scribouilleux sont souvent plus forts que mes tendances Monsieur-Madame-Tout-le-Monde, j’ai pris soin de me procurer les services de la guide Carole Deveau, elle-même artiste et calligraphe accomplie.
Toutes ses visites guidées débutent sous l’arbre «scenocosmique» de Grégory Lasserre et Anaïs met den Ancxt.
Nous étreignons tendrement l’arbre, comme une peluche précieuse dont les pulsations nous revigorent.
Deveau mentionne que de toutes les œuvres au Symposium, celle-ci est la plus «facile» à saisir par les non-initiés.
Pendant que nous sommes là, béats presque à s’enrouler autour du tronc, un troupeau de joggeurs multicolores surgit de nulle part un bref instant avant de disparaitre aussitôt dans le feuillage, comme des daims.
Deveau m’invite ensuite à descendre la pente qui aboutit à la prochaine installation.
(En fait, peu importe la direction que nous choisissions, tous les chemins mènent à l’Art.)
Nous croisons Marie-Êve Cormier, une des trois membres du collectif M+M+M, présentement occupée à cueillir des feuilles jaunes qui vont servir à camoufler le belvédère en bois qui s’élève parmi les herbes hautes. Alors qu’une deuxième M, Marika Drolet-Ferguson, s’affaire à bruler des planches de bois avec un lance-flammes, Deveau m’explique qu’il s’agit d’une ancienne technique japonaise nommée Yakisugi, une forme de protection naturelle du bois par carbonisation. Le trio (complété par Mathieu Boucher Côté, et épaulé par l’homme à tout faire du Symposium, Mathieu Vautour), doit mettre toute la gomme pour assurer la complétion de leur œuvre, de catégorie permanente en plus, Kiss & Fly.
Pendant la semaine, Deveau a vu, dans le Parc, la professeure d’un cours d’herbes médicinales donner une classe en plein air à ses étudiants, leur montrant des spécimens prisés tels la verge d’or, le sumac, le millefeuille. Pas toujours besoin de se déplacer jusqu’en Amazonie pour trouver les ingrédients qu’il faut pour stocker son armoire à pharmacie!
Nous aboutissons devant la tour abracadabrante de José Luis Torres, l’œuvre qui, lors des visites guidées de Deveau, a soulevé le plus de polémiques.
«Cé-ti beau?»
Question à la base de l’esthétique. Très importante d’ailleurs. Mais qui pourrait prendre un semestre à répondre.
Ou trois secondes.
«N’importe qui pourrait faire ça!»
Commentaire répété ad nauseum face aux ready-mades de Marcel Duchamp ou aux toiles des adeptes de colorfield painting.
« Ça s’grimpe-ti? »
Voilà une question plus pertinente. Une qui devra sans doute se faire répondre très prochainement par la sécurité de l’Université de Moncton.
Pendant que nous contemplons la tour, une grand-mère et son petit-fils, des habitants du quartier de Sunny Brae, se joignent à nous. «Cé comme cool!» affirme le jeune en trottinette. Sa grand-mère est d’avis que cela ressemble à un vaisseau spatial.
«Klingon, définitivement. Parce les vaisseaux de la Fédération, i’ont plus de courbes.»
Comme quoi Star Trek est un magnifique portail à l’art nature!